La Peinture d'Ansy Dérose
par Michel Phillipe Lerebours

     
                 

     
La peinture
d'Ansy Dérose par:
         
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Il y a parfois des choix douloureux qui s’imposent et qu’on ne peut accepter sans risquer une mutilation de soi. Ansy a-t-il eu raison de laisser tomber la peinture pour s’adonner au chant? Il est clair qu’il lui était difficile, en plus de ses activités d’architecte, de ferronnier… en plus de la direction de l’Ecole professionnelle J.B. Damier, de cultiver la peinture et le chant avec la conscience et l’assiduité que la pratique de ces deux disciplines aurait réclamées. On ne peut regretter qu’il ait opté pour le chant quand on se souvient de sa voix chaude, troublante et passionnée qui a fait vibrer le public haïtien en des moments inoubliables.

On peut cependant déplorer qu’une aventure picturale aussi singulière, aussi prometteuse, ait été aussi brusquement interrompue au moment même où, pris dans le tourbillon de l’angoisse, se cherchant désespérément un havre, il croyait pouvoir au bout d’un long et difficile cheminement, déboucher sur un univers de plénitude, réponse à toutes ses interrogations. Aventure solitaire et insolite qui ne pouvait se concevoir sans effroi et qui peut-être exigeait trop de lui. Qu’il ait repris le pinceau deux ans avant sa mort, plus de vingt ans après l’avoir déposé, prouve assez qu’il n’avait jamais pleinement accepté son sacrifice. Il savait qu’il avait des choses à dire que seul pouvait exprimer le langage de la peinture, qu’il lui fallait, pour opérer la descente au tréfonds de l’être, de ces paroles parfois hermétiques que seule pouvait véhiculer la ligne de la couleur. Mais aussi un cauchemar hallucinant où  le réel ne pouvait surgir que de la désintégration des apparences.

C’est très tôt qu’il faut placer sa rencontre avec le dessin et la peinture. Il était à l’école primaire lorsqu’il dessinait avec cette même ardeur, cette même fougue qui devaient le caractériser plus tard quand, pétrissant, modelant, martelant, taillant, soudant, ajustant avec ses mains, dans un contact presque charnel, il affrontait la matière pour la transformer et l’ennoblir. La matière restera toujours toute proche de lui, donnera à ses œuvres une sensualité douce et troublante, combien viscérale.

     
 

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